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Aide existante : les précisions de la CJUE quant aux éléments à considérer pour constater un avantage

Affaires - Droit économique
Public - Droit public des affaires
21/04/2021
Dans un arrêt du 4 mars 2021, la CJUE a rappelé au Tribunal de l’Union européenne la distinction à opérer entre aides individuelles et mesures d’application d’un régime d’aides, puis les points à analyser par la Commission afin de déterminer si un régime d'aides procure ou non un avantage à ses bénéficiaires.
Cette affaire fait suite à une réforme de 1990 qui imposait aux clubs sportifs professionnels espagnols qui exerçaient sous forme de personne morale sans but lucratif de se transformer en sociétés anonymes sportives. Seuls pouvaient échapper à cette contrainte ceux qui avaient réalisé un résultat positif lors des exercices précédant l’adoption de cette loi. Or, le taux d’imposition de ces entités sans but lucratif étant inférieur à celui applicable aux sociétés anonymes sportives, la Commission a constaté qu’il s’agissait d’un régime d’aide illégal et incompatible avec le marché de l’Union. La Commission a donc imposé à l’Espagne d’y mettre fin et de récupérer les aides individuelles octroyées.

Saisi par recours d’un des clubs de footballs concernés, le Tribunal de l’Union a, quant à lui, considéré que la Commission aurait dû vérifier si ce taux réduit d’imposition ne pouvait pas être contrebalancé par un autre taux moins favorable aux entités sans but lucratif qu’aux sociétés anonymes sportives.

La CJUE, amenée à trancher ce litige après pourvoi de la Commission, a contredit la Tribunal. Elle a, en premier lieu, constaté que le Tribunal avait commis une erreur de droit en affirmant que la décision litigieuse concernait à la fois un régime d’aides et des aides individuelles. En effet, la CJUE a constaté que le régime fiscal litigieux était susceptible de s’appliquer « de façon générale et abstraite, pour une période et un montant indéterminés, et cela sans qu’il soit besoin de mesures d’application supplémentaires et sans que ces dispositions soient liées à la réalisation spécifique ». Elle en déduit que la Commission s’était bien prononcée sur un régime d’aide puis sur des simples mesures d’application de ce régime.

Dans un second temps, elle estime que les conclusions du Tribunal de l’Union étaient viciées quant à l’étendue des obligations de la Commission pour prouver l’existence d’un avantage. Alors que le Tribunal considérait que la Commission aurait dû prendre en compte d’autres composantes du régime fiscal litigieux, la CJUE précise que l’existence d’un avantage ne peut dépendre de la situation financière des bénéficiaires au moment où la régime d’aide est mis en œuvre en leur faveur.

Ainsi, lorsqu’il est impossible de déterminer le montant exact dont bénéficieront les bénéficiaires au moment de l’adoption d’un régime d’aide, la Commission est fondée à constater que le régime est susceptible de constituer un avantage. L’État concerné doit donc notifier le régime d’aide envisagé.

La CJUE précise que le montant exact des aides perçues par les bénéficiaires sera calculé lors de la récupération.
Elle en déduit qu’il ne pouvait être imposé à la Commission, pour déterminer si l’autorisation faite à certains clubs sportifs professionnels espagnols de continuer à exercer sous forme de personne morale sans but lucratif en bénéficiant d’un taux d’imposition plus faible leur procurait un avantage au sens de l’article 107 TFUE, de prendre en compte les autres mesures fiscales applicables à ces mêmes entités.
 
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle privé, voir Le Lamy Droit économiquen° 2210 et suivants.
Pour des développements détaillés en matière d’aides d’État sous l’angle public, voir Le Lamy Droit public des affairesn° 775 et suivants.
Source : Actualités du droit